6 octobre 2011

Enfin un livre de référence sur les méfaits de la télévision

« Sophie, 2 ans, regarde la télé une heure par jour. Cela double ses chances de présenter des troubles attentionnels en grandissant » affirme Michel Desmurget, docteur en neurosciences et chercheur à l’INSERM. Mais « critiquer la télévision, c’est, en bout de chaîne, éreinter celui qui la regarde. Si vous affirmez ‘la télé est toxique pour les enfants’, la fameuse ménagère de moins de 50 ans traduira ‘je suis une mauvaise mère et j’éduque mal mes gosses’. Ce genre d’idées passe d’autant plus mal qu’une armée d’‘éminents spécialistes’ s’évertuent à saturer l’espace public de propos lénifiants », admet ce chercheur. Cela ne l’a pas empêché, bien au contraire, de publier en avril dernier un ouvrage de référence, TV Lobotomie (Max Milo, 2011), au terme de quatre ans de recherche. Cet ouvrage repose sur des centaines d’études scientifiques publiées dans le monde au sujet des effets de la télévision sur l’intelligence et la santé. L’ouvrage est doté d’un appareil de notes très complet – 1193, très exactement ! Toute affirmation repose sur des études scientifiques dont les références exactes sont données en annexe pour que chacun puisse vérifier par soi-même. « Cette dénonciation de la nocivité de la télévision est ‘tellement difficile à entendre’ qu’il fallait donner les notes et références scientifiques », explique le Dr Desmurget dans une interview donnée à Enquête et Débat.

Pour lui, « le poste est un voleur de temps. Il est aussi une cause d’isolement social, une source de paresse intellectuelle, un agent de stérilité cognitive et un vecteur de déstructuration psychique ». Savez-vous qu’« un écolier du primaire passe, tous les ans, plus de temps devant le tube cathodique que face à son instituteur (956 heures contre 864) » et que cela représente 75 % de son temps libre ?

De fait, la liste des effets nocifs de la télévision est assez impressionnante. Citons en quelques-uns, en développant ceux qui concernent l’éducation et la famille :

– La télévision « empêche le déploiement optimal des fonctions cérébrales », compromettant ainsi « l’ensemble du devenir intellectuel, culturel, scolaire et professionnel de l’enfant ».

– La télévision fait apparaître des troubles du langage chez l’enfant, associés à des troubles de l’élocution, notamment parce qu’elle limite les interactions entre les personnes réelles et laisse moins de temps aux activités ludiques spontanées.

– La télévision occasionne des retards de langage et fait baisser le niveau de compétence langagière, elle limite l’acquisition de vocabulaire et l’accès aux compétences syntaxiques de base.

– La télévision a un « impact négatif sur l’attention, les facultés d’apprentissage et la réussite scolaire à long terme ». Avec un risque accru de quitter l’école sans diplôme et de ne jamais s’asseoir sur les bancs de l’université.

– La télévision occasionne des difficultés en lecture, et fait baisser le temps de lecture, qui se trouve réduit à la portion congrue ; ainsi, un flux cathodique permanent (la télévision en bruit de fond) diminue de presque 30 % le temps de lecture des 5-6 ans, qui passe de 49 à 35 minutes quotidiennes en moyenne.

– La télévision fait baisser le niveau scolaire général, en français comme en mathématiques et, par manque d’interaction, n’aide en rien à apprendre les langues étrangères.

– La télévision fait baisser le niveau universitaire. Un seul exemple : « Jean aimerait obtenir un MBA. Il est sur la liste d’attente d’un établissement prestigieux et sent ‘les pieds de Damoclès au-dessus de sa tête’. » L’étudiant soumis depuis la petite enfance à une forte exposition à la télévision souffre de très graves lacunes en orthographe, en conjugaison, en syntaxe, en vocabulaire, il manque de logique, de capacités analytiques et d’esprit de synthèse – tout cela lui interdit tout accès à des savoirs complexes.

– La télévision, « troisième parent cathodique », réduit « drastiquement le volume et la qualité des interactions parents-enfants », mutilant ainsi la sociabilité intrafamiliale.

– La télévision castre l’imaginaire enfantin ; les enfants rejouent les scripts des films et des séries et n’inventent plus de jeux.

– La télévision augmente la consommation de tabac et d’alcool et la fait commencer plus tôt.

– La télévision pousse au sexe de plus en plus jeune et génère des taux élevés d’avortements chez les adolescentes (cf. Une étude porte spécifiquement sur l’addiction à la série mythique « Desperate housewives » et démontre qu’elle multiplie par trois le risque de grossesses non désirées chez les adolescentes.)

– La télévision accélère le déclin du niveau cognitif des séniors et accroît les maladies d’Alzheimer.

– La télévision constitue une addiction psychologique chez les enfants et les adultes, notamment en accaparant l’attention par le changement perpétuel.

– La télévision augmente l’obésité. Regarde la télévision plus de 2 heures par jour multiplie le risque de surpoids d’un enfant de 3 ans de 2,6 % ; pour un adolescent, ce risque augmente de 55 %.

– La télévision diminue l’espérance de vie, en ayant une forte influence négative sur les pathologies cardiovasculaires.

– La télévision favorise la violence. Aux États-Unis, 60 % des émissions télévisées contiennent des actes de violence, qui, le plus souvent sont réalistes et n’occasionnent ni remords ni sanction.

Cette étude doit être prise au sérieux surtout si l’on considère que 50 % des Français allument la télévision en arrivant chez eux, par réflexe, et qu’ils la regardent en moyenne 3 h 32 par jour (chiffres de 2010; cf pour plus de détails ).

Et le Professeur Desmurgets de conclure : après la cigarette ou le fast food, nul doute que la télévision sera la prochaine grande question de santé publique. Il donne cinq pistes aux parents responsables : au mieux « zéro télé » pour toute la famille ; sinon, pas de poste dans la chambre des enfants ; pas de télévision avant 6 ans ; moins de 3 heures par semaine devant un écran (télévision ou vidéo) pour les écoliers et les collégiens, et jamais le soir ; et pour les adultes, avoir toujours à l’esprit les risques d’isolement, de maladies, de déclin cognitif…

“Développer un cerveau plus fort que les écrans”, c’est le pari d’un Québécois, initiateur du défi « 10 jours sans écran », qui intervient jusque dans les écoles françaises comme à Herblay. Parce qu’un peu de télé en moins, c’est beaucoup de vie en plus !

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